Le Mat marchait maintenant avec une nouvelle assurance, enrichi par la rencontre avec le Diable, conscient de ses forces comme de ses faiblesses. Cependant, son voyage allait prendre un tournant inattendu. Alors qu'il gravissait une colline escarpée, il aperçut au sommet une imposante tour qui semblait toucher le ciel. Construite de pierre brute, elle semblait s’élever avec fierté, défiant les éléments depuis des temps immémoriaux.
Mais à mesure qu’il approchait, un grondement sourd se fit entendre, comme si la terre elle-même respirait de façon menaçante. La foudre déchira soudain le ciel et frappa la tour avec une force effrayante. Des morceaux de pierre volèrent, des éclats de lumière illuminèrent les environs, et la tour commença à s’effondrer sous ses yeux. Le Mat se recula, impressionné par cette scène de destruction.
Il comprit qu'il se trouvait devant l'Arcane de la Maison Dieu.
Sous le choc de l’effondrement, deux personnages, qui avaient été prisonniers des hauteurs de la tour, furent précipités au sol, jetés hors de cette structure imposante. Ils se relevèrent, un peu ébranlés mais indemnes, comme libérés d’un état de somnolence. Ils regardaient la tour avec une expression mêlée de stupeur et de soulagement.
Soudain, une voix calme et puissante résonna dans l’air, s’adressant au Mat : « Bienvenue, voyageur. Tu te tiens ici devant l’épreuve de la Maison Dieu. Comprends-tu ce que signifie cet effondrement ? »
Le Mat secoua lentement la tête, encore saisi par la force de la scène. « C’est comme si quelque chose de grand et d’arrogant venait d’être détruit… Mais pourquoi ? »
La voix reprit, avec une solennité apaisante. « La Maison Dieu est le symbole de ce que l’on bâtit pour se protéger, pour se sentir puissant, mais qui finit par devenir une prison pour l’esprit. C’est l’illusion de la sécurité absolue, l’attachement à des structures rigides, des certitudes, des croyances érigées comme des tours. L’éclair divin est là pour te rappeler que rien de matériel, rien de fixe ne peut emprisonner l’âme. Parfois, il faut tout déconstruire pour découvrir une vérité plus profonde. »
Le Mat sentit une grande vérité dans ces mots. Il réalisa qu’il avait lui aussi construit des « tours » invisibles, des idées bien ancrées, des illusions de stabilité qui s’étaient transformées en barrières pour son esprit. Peut-être que ces anciennes conceptions, ces fausses sécurités, avaient besoin d’être ébranlées pour que son âme puisse véritablement s’épanouir.
« Mais si tout ce que l’on construit est voué à s’effondrer, alors à quoi bon bâtir quoi que ce soit ? » demanda-t-il, désorienté.
« Ce n’est pas la construction en elle-même qui est un problème, » répondit la voix, « mais l’attachement à ce que l’on bâtit, la conviction que cela durera pour toujours et définira qui tu es. La Maison Dieu t’enseigne la libération des structures mentales rigides, des idées figées. Elle te montre que la véritable croissance réside dans la capacité à te renouveler, à accepter les changements, même lorsque tout semble s’effondrer. »
Le Mat prit une profonde inspiration. Cette tour n’était pas seulement une image de destruction, mais aussi de libération. En lâchant prise sur ses croyances et ses attachements anciens, il sentait qu’il s’ouvrait à un potentiel nouveau, qu’il s’offrait la possibilité de reconstruire sur des bases plus flexibles et authentiques.
La voix murmura doucement : « Maintenant, Mat, contemple les ruines. Que ressens-tu ? »
En observant la tour effondrée, le Mat ne ressentait plus de peur ni de tristesse, mais une étrange légèreté, une libération profonde. Les pierres, qui semblaient autrefois immuables, se dispersaient maintenant librement, comme si elles rendaient à la terre ce qui lui appartenait. Il comprenait que les ruines n’étaient pas une fin, mais le terreau d’une nouvelle liberté, d’une renaissance.
Le Mat se redressa, inspiré, prêt à continuer son chemin avec une foi renouvelée en lui-même, dépouillé de ses attachements inutiles. Il n'avait plus besoin de se cacher derrière des murs ou des illusions de grandeur ; il pouvait simplement être lui-même, ouvert et réceptif aux expériences à venir, prêt à s'adapter aux courants de la vie.
La voix se fit alors douce et bienveillante : « Va, Mat, et souviens-toi que chaque effondrement peut devenir le point de départ d’une élévation nouvelle. Ta véritable maison est en toi, et elle ne se construit ni ne se détruit, car elle est l’essence même de ton être. »
Avec gratitude, le Mat reprit son chemin, le cœur plus léger et l’esprit plus clair, conscient que chaque étape, chaque épreuve lui permettait de se libérer un peu plus des illusions pour se rapprocher de la vérité de son être.
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